Aurélien, vous accordez beaucoup d’importance aux attentes des utilisateurs. Comment un espace donné a-t-il un impact sur ces attentes ? En d’autres termes, comment l’environnement extérieur façonne-t-il les besoins de chacun ? 

Le design de service s’applique assez naturellement à un environnement fermé : un bureau, une salle d’attente, une chambre… on a par exemple l’image d’un habitat « cocon » dédié au bien-être. L’extérieur est plus chaotique, et la vie en extérieur est une problématique qui nous est rarement posée.

Et pourtant. Il y a beaucoup à dire sur les émotions d’un utilisateur dans une ville. Le monde urbain est un lieu brutal : du béton, des chemins déjà construits et pas nécessairement les mieux conçus pour les utilisateurs actuels. On est dans un moment de coupure stricte, symbolisé par le feu rouge qui coupe la fluidité du parcours.

Or de manière générale, le design de service amène justement plus de fluidité dans les échanges et les interactions. Cela passe notamment par la conception et la mise en place d’éléments favorisant  l’architecture d’informations, ainsi qu’une meilleure prise en compte de l’ergonomie.  Enfin le design de service permet aussi d’acquérir et de fidéliser des utilisateurs en créant des expériences fortes et mémorables.

Bien sûr, il ne s’agit pas de parler exclusivement de forme ou de confort d’usage, notions traditionnellement associées au design, mais plutôt «des relations humaines, des interactions et des parcours dans des territoires donnés». Il s’agit donc d’une approche où le design étend son rôle de conception naturelle, en explorant de nouveaux territoires, économiques, sociaux, voire même politiques.

Diriez-vous qu’il y a une spécificité à cette identité Méditerranéenne, réelle ou fantasmée ? Et comment cette identité va-t-elle / doit-elle évoluer ?

L’avenir de la vie en extérieur méditerranéenne passera par un travail sur la fluidité. Prenez la mer : un morceau de territoire non utilisé par les citadins, qui peut devenir un lieu de passage doux, en connexion avec la nature. Je pense au transport maritime, bien sûr.
Mais pour ce faire, il est essentiel d’être  précis dans l’usage des méthodologies que l’on apporte, et aussi de comprendre que le design est l’affaire de tous. Il est donc important de communiquer sur la notion d’expérience, et sur les atouts de l’innovation centrée usager. Seule une réelle prise en compte des attentes de tous les individus impliqués et concernés, peut garantir la réussite d’un projet.

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Il s’agit donc avant tout de trouver le bon rythme ?

C’est du moins ce que l’on cherche à instaurer au cœur de l’expérience urbaine. En fait, ce que nous essayons d’initier à travers nos actions, c’est une nouvelle approche, un nouveau regard sur notre quotidien et notre environnement, en créant par exemple un instant de calme tel qu’on peut le trouver dans tous les espaces naturels : calanques, parc, etc… . Le tram est un moyen de transport qui a été pensé dans cette perspective de lier la ville à la nature. On se retrouve ainsi dans une bulle au cœur d’un paysage agréable, requalifié, un pied dehors et l’autre dedans. Nos places devraient elles aussi, être conçues avec cette même idée d’offrir aux citadins, un temps de repos dans l’espace public, tout le long de la journée.
Est-ce parce qu’on a donné la priorité aux attentes des touristes, avant celles des habitants ? Quoiqu’il en soit, le temps de pause est trop souvent négligé dans nos villes. C’est une notion pourtant essentielle de la vie en extérieur, qui ponctue les moments de circulation et de divertissement.

Pourriez-vous nous décrire un de vos projets pour bien comprendre les apports du design de service ?

En Juin 2013, dans le cadre de sa démarche en faveur de l’ouverture des données numériques publiques, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur a organisé un concours d’usages et de services numériques innovants, liés à l’Open Data. L’objectif était de valoriser et de soutenir les porteurs de projets d’applications, de services ou de visualisation de données interactives, utilisant les données ouvertes et publiques de la région.

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Il s’agissait avant tout de créer une application adaptée aux nouveaux modes de vie afin que chacun reste connecté aux actualités de sa ville. L’objectif était également de pouvoir actualiser soi-même les informations par quartier, de donner son avis et de pouvoir consulter les bons plans du moment.

Lauréat du concours, notre projet a été suivi durant huit mois par des professionnels de l’accompagnement entrepreneurial (Incubateur National Belle de Mai, Incubateur inter-universitaire Impulse et Marseille Méditerranée Technologie) pour une période de pré-incubation.

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Cet accompagnement nous a permis de développer et de peaufiner l’application VIRADO qui a donc pour objectif d’impliquer l’utilisateur au sein de son environnement urbain. Avec cette application, le citoyen n’est plus un simple spectateur. Physiquement au centre de la ville, il en devient l’acteur principal et crée l’événement en produisant et relayant des informations sur les lieux tendances, ou à éviter.
VIRADO connecte ainsi Marseille afin de la rendre plus intelligente et plus vivante, grâce aux contributions et commentaires de ses propres citoyens.

Pour aller plus loin :

Site de la société Atrioom

Article sur Atrioom